L’ange au bandonéon

Je l’imagine souvent parfois même j’arrive à le voir quitter l’endroit où il se trouvait pour aller se poster ailleurs, étagère, commode, table. Est-il vivant, est-ce simplement un ange ailes repliées, bandonéon refermé plaqué contre sa poitrine, coudes appuyés fermement à son torse. Ses grosses mains maintiennent fermement l’instrument contre lui comme pour à la fois le retenir et le protéger mais aussi l’exhiber.
Quand je le vois, ce que je regarde d’abord toujours c’est son visage rose rectangulaire encadré par de longs cheveux marrons tombant jusqu’aux épaules et à toucher le bandonéon. Le haut visage retenu par d’épais sourcils en arcs accentués retenant eux-mêmes les yeux écarquillés au dessus des lèvres épaisses dessinées d’un rouge tenu, ni fermées ni entrouvertes.
Rien ne bouge de cet ange en bois. Ni le visage ni le corps serré dans une tunique bleu roi, rayée d’or en verticales, tombant jusqu’aux pieds, nus et joints. C‘est bien un ange immobile, frappé d’attente timide, interrogateur.
Quant à ses deux ailes ni obliques ni verticales, on ne sait jamais à le voir arrêté si elles le maintiennent debout ou si elles ne sont pas fichées dans son dos par surprise, mortellement, ce qui lui donne cette intense expression d’attente.

Jean-Jacques Viton

OEuvre : Matthias Olmeta

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